Accès Libre - Libre Arbitre

Frantisek Janula


Vernissage le 29 janvier 2010

"Une fenêtre sur Prague"


au 9 rue de la Maladrerie - 93 300 Aubervilliers
Métro : Fort d'Aubervilliers
Tél : 01 48 34 85 07

 

Exposition visible jusqu'au 19 février 2010
Entrée libre et gratuite


Prague tremplin des rêves

 

Au zénith de sa trajectoire créatrice, Janula nous convie aujourd'hui à une fabuleuse fête, la fête de l'icône elle-même. Cependant, le sacré, ici, ne se concentre point dans la physionomie nimbée de lumière de quelque improbable divinité, mais dans Prague, la Ville Dorée. Comme au font d'un tabernacle, la Ville Dorée dissimule son immémoriale figue, celle qui défie le temps et la vanité des croyances humaines.

 

Dans ces authentiques retables de notre fin de siècle que sont  les Grandes Fenêtres de Janula, entre le panneau du fond, opaque et univoque, et les volets à triple lecture, s'offrent à nous les sept versions contradictoires et complémentaires de l'icône. Le panneau du fond, en bois, supporte une image volontairement neutre et somme toute assez banale de ces hauts lieux que sont le Château royal, le pont Charles IV, les églises baroques, le jardin Vrtboska. Les volets, en fibre de verre, peints au recto et au verso, appellent en outre une vision par transparence et superposition. Et au contraire du panneau du fond, ils laissent toute la place à l'invention. Néanmoins, il n'existe pas de solution de continuité entre ceux-ci et ceux-là, car ceci renvoie à cela, et cela renvoie à ceci. Icône multiple et multiplicatrice, éblouie et éblouissante, enchantée et enchanteresse, icône accordéon d'images.

 

Que l'on ne s'y trompe pas, ceci est également une fête de la peinture. Depuis Léon Battista Alberti au Xve siècle, le tableau a été fréquemment assimilé à une fenêtre. Mais il faut reconnaître que cette analogie, toute théorique, n'avait qu'assez médiocrement inspiré les peintres jusqu'à ce jour, à quelques fulgurantes intuitions près de Caspar Friedrich à René Magritte en passant par Robert Delaunay et par Henri Matisse. Avec Janula, tout est remis en cause, y compris une question aussi quotidienne que celle-ci : « Vaut-il mieux qu'une fenêtre soit ouverte ou fermée ? » ou à plus forte raison cette autre un peu plus originale tout de même : « Que se passe t-il lorsqu'une fenêtre, se prenant pour une glace sans tain, nous permet de passer de « l'autre côté » du visible ? » Car la fenêtre, cessant alors de donner sur le monde extérieur, donnerait résolument sur le monde intérieur. Mais la Grande Fenêtre de Janula, c'est autre chose encore, car non seulement elle donne à la fois sur le monde extérieur et sur le monde intérieur, mais elle se situe en ce point privilégié d'où, comme il a été dit, les contraires « cessent d'être perçus contradictoirement ».

 

Et ce n'est pas pour rien sans doute qu'entre toutes le villes du monde, ce soit Prague qui prête à pareille alchimie. Prague feu d'artifice des nostalgies, Prague ivresse du furtif, Prague tremplin des rêves, Prague « gueule de bois » de ce qui n'arrivera plus.

 

José Pierre - Paris le 25 février 1995

 



25/01/2010

A découvrir aussi